samedi 1 décembre 2012

SIDA : La méthode ABC

Salut tout le monde !

Aujourd'hui, le 1° décembre, nous célébrons la Journée Mondiale de Lutte contre le SIDA. Depuis plus de 30 ans maintenant, cette redoutable maladie qui détruit le système immunitaire des personnes infectées par le virus a tué plus de 34 millions de personnes dans le monde et est considérée à juste titre comme un des plus grands fléaux de notre époque. Alors, j'ai eu envie de m'associer à tous ceux qui aujourd'hui s'engagent pour soutenir la lutte contre cette tragique épidémie. Pour l'occasion, j'ai voulu faire connaître une méthode de lutte contre la propagation du SIDA qui est très connue et usitée dans le monde, mais beaucoup moins en France : la méthode ABC.

Il y a environ un an, je me promenais un soir au centre-ville quand j'ai été abordé par un militant AIDES qui informait sur le travail de son organisme et proposait aux passants de devenir donateurs. Je me suis arrêté pour discuter quelque temps avec ce jeune homme très sympathique et lui expliquer que je respectais beaucoup le travail de toutes les associations engagées dans la lutte contre le SIDA, mais que j'avais malheureusement l'impression qu'elles ne s'attaquent souvent qu'aux symptômes de l'épidémie et pas au fond du problème. Je pense que le seul et unique moyen de porter un coup fatal à l'épidémie du SIDA est de s'attaquer aux circonstances dans lesquelles la maladie se transmet. Ensuite, il faut venir en aide à toutes les personnes déjà infectées, lutter contre toutes les stigmatisations et discriminations desquelles elles peuvent être victimes, leur fournir les meilleurs soins médicaux pour les aider à vivre une vie la plus normale possible et tout faire pour leur éviter de transmettre le virus à leur entourage. Puisque la voie sexuelle est de très loin le principal facteur de transmission du virus du SIDA, c'est dont à ce facteur qu'il faut s'attaquer en priorité, sans négliger les autres. C'est là qu'intervient la méthode ABC, dont le nom est en anglais un acronyme pour : "Abstinence - Be faithful - Condoms".

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La méthode ABC est une stratégie de lutte contre la propagation du SIDA fondée sur l'éducation sexuelle : elle encourage l'abstinence sexuelle jusqu'au mariage, la fidélité dans le cadre du mariage et l'usage de préservatifs pour les couples mariés. Cet ordre a souvent été compris à tort comme un ordre des priorités : il ne s'agit pas d'encourager l'abstinence comme une vertu en elle-même (un non-sens), la fidélité pour ceux qui ne tiennent pas le coup et le préservatif comme moindre mal pour ceux qui n'arrivent pas à être fidèles ; mais plutôt de poser les trois cadres successifs, aussi importants l'un que l'autre, pour enrayer la pandémie. Originaire des Etats-Unis et populaire surtout dans le monde anglo-saxon, la méthode ABC est une des plus répandues dans le monde pour lutter contre le SIDA, notamment en Afrique qui reste le continent le plus touché par la pandémie. Partout où elle est utilisée, elle a fait ses preuves, l'exemple le plus flagrant étant celui de l'Ouganda, jadis un des pays les plus contaminés d'Afrique qui, de 1980 à 1990 puis 2001, a fait chuter son taux d'infection de 30% à 14%, puis 5% ! Pourtant, en France, elle est très peu connue... d'où mon envie de contribuer à la faire connaître davantage.
Voyons donc les 3 points de la stratégie :

Abstinence
A pour Abstinence, le choix de rester vierge jusqu'au mariage. J'ai déjà beaucoup écrit sur pourquoi je suis persuadé que le choix de se préserver en exclusivité pour la personne avec qui on passera sa vie entière est le meilleur choix qu'on puisse faire dans ce domaine, pour soi-même autant que pour les autres. (Voir notamment ici et ici.) Ici, je me contenterai de rappeler que l'abstinence reste le seul contraceptif vraiment à 100% efficace, qui protège à la fois des grossesses non désirées,  du SIDA et des autres MST.

Be faithful
B pour Be faithful, le choix de la fidélité dans le mariage. Chaque nouveau partenaire sexuel sera peut-être celui qui nous transmettra le virus. Bien sûr que le SIDA n'est pas directement lié à l'infidélité, mais n'empêche que mathématiquement, plus on a de partenaires différents, plus il y a de chances que l'un d'entre eux soit séropositif. Donc, si tu sais que tu ne l'es pas et que ton partenaire ne l'est pas non plus, alors il n'y a qu'un moyen d'être certain de ne jamais le devenir (du moins pas par voie sexuelle) : en partageant ton intimité avec une seul partenaire sexuel. La meilleure façon de te protéger toi-même et de protéger la personne que tu aimes et qui partage ta vie : te consacrer à cette personne en exclusivité.

Condoms
Nous arrivons au troisième point : C pour Condoms, les préservatifs, contraceptifs qui protègent contre le virus. Ce n'est pas une option, c'est exactement aussi important que les deux premiers points : pour lutter contre le SIDA, en plus d'éduquer à l'abstinence jusqu'au mariage et à la fidélité dans le cadre du mariage, il faut aussi encourager l'usage du préservatif, informer sur le principe de la contraception pour corriger toutes les idées reçues qu'il peut y avoir et en expliquer le fonctionnement pour une meilleure utilisation possible.
J'ai parlé plus haut du cas de l'Ouganda, qui a défrayé la chronique en devenant le premier pays au monde à réussir à réduire de façon importante son taux d'infection du SIDA. Ce résultat remarquable a été obtenu en grande partie en appliquant la méthode ABC... mais depuis 2004, on constate que malheureusement, le taux d'infection augmente de nouveau. La principale raison : les points A et B de la méthode sont mis en avant aux dépens du C. Le plus grave pour moi : les principaux coupables sont les églises qui, en insistant dans leur discours moral sur l'abstinence et la fidélité, négligent voire découragent l'usage de préservatifs... Ce triste exemple suffit à nous montrer que A et B ne suffisent pas : le virus du SIDA est transmis aussi par les rapports sexuels des couples mariés ! Par conséquent, lorsque le couple sait qu'un des deux conjoints est infecté ou qu'il n'en a pas la certitude mais que la question se pose, l'usage du préservatif est impératif !
Certains répondront que le préservatif n'est jamais efficace à 100% parce qu'il peut craquer. C'est vrai, mais s'il est bien utilisé ce risque est infiniment faible (d'où l'importance d'informer sur l'usage correct) et surtout, est-ce que parce que le risque 0 n'existe pas, on va rejeter une solution qui marche dans bien plus de 99% des cas ?
A noter qu'il existe aussi des moyens médicaux de limiter très fortement le risque de transmission mère-enfant à la naissance et que si ceux-ci se développent au point d'être accessibles à grande échelle, y compris dans les pays pauvres, il faudra également les promouvoir, pour les mêmes raisons.

Cas particuliers
Il faut penser aussi à un certain nombre de situations spécialement douloureuses, dans lesquelles A et B ne suffisent pas, mais C apporte une réelle solution.
Par exemple, les personnes dont le conjoint est infidèle. Ce problème se pose particulièrement dans certaines cultures africaines, dans lesquelles les hommes sont encouragés à avoir des relations avec de nombreuses femmes, ce qui est d'ailleurs pour beaucoup dans l'avancée galopante de l'épidémie sur ce continent. Grâce au préservatif, une femme elle-même fidèle dont le mari aura été contaminé par une de ses maîtresses pourra éviter d'être infectée à son tour.
Ensuite, il y a ce qu'on appelle les catégories "à risque", ces personnes que leur mode de vie expose à un très grand risque de contamination. Il s'agit essentiellement, mais pas exclusivement, des prostitué(e)s. Ces personnes, qui n'ont le plus souvent pas choisi cette vie mais y sont contraintes par la pauvreté et souvent par la méchanceté des autres, sont victimes de toutes sortes d'injustices en plus du risque permanent d'être infectées par le virus, sans même parler de la honte liée à leur situation. En même temps, tant qu'il restera encore des personnes assez mauvaises pour abuser ainsi de leurs semblables, leur calvaire ne pourra malheureusement pas prendre fin. Par conséquent, si les préservatifs peuvent au moins l'atténuer quelque peu en les protégeant contre cette maladie mortelle, c'est déjà une bonne chose.

Capotes & cathos ?!
Quand on parle de contraception, et encore plus quand c'est un croyant, comme moi, qui en parle, cela suscite toujours des interrogations, à cause des idées vraies ou fausses qu'on se fait sur la vision chrétienne de la contraception. C'est pourquoi, j'ai voulu faire une partie spécifiquement pour expliciter comment je vois la contraception par rapport à ma foi.
Il y a quelques années, les propos du pape Benoît XVI sur le préservatif lors de son voyage en Afrique ont fait beaucoup de bruit. En effet, la position officielle de l'Eglise catholique sur le sujet est un refus de principe de la contraception (position officielle ne signifiant évidemment pas que l'ensemble des catholiques est d'accord). J'en ai d'ailleurs débattu pas plus tard que la semaine dernière avec un groupe de jeunes catholiques traditionalistes qui m'avaient invité à une de leurs rencontres. Leurs arguments sont d'une part que l'usage banalisé de contraceptifs donne une fausse impression de liberté en faisant croire, notamment aux plus jeunes, qu'on peut vivre sa vie sexuelle comme on le souhaite sans conséquences (jusqu'ici je suis d'accord), d'autre part que puisque Dieu a créé la sexualité dans le but de la reproduction, user de moyens artificiels pour contrer la nature et empêcher la fécondation lors de rapports sexuels va à l'encontre des plans divins. Cette position ne me paraît ni juste ni fondée : Dieu nous a aussi dotés d'une intelligence qui nous rend capables de maîtriser notre fécondité et d'inventer des outils techniques nous y aidant. Bien sûr que la sexualité existe pour permettre la reproduction, et heureusement, mais il n'y a rien dans la Bible qui indique que le plaisir sexuel n'est pas une bénédiction en lui-même, qu'il est illégitime d'avoir des rapports sexuels sans chercher à procréer ni qu'il n'est pas permis de contrôler sa fertilité ! Je ne vois donc aucune raison de refuser l'usage de contraceptifs dans le cadre que Dieu a prescrit à la sexualité : les rapports sexuels des couples mariés, par exemple pour éviter provisoirement d'avoir un enfant si la situation sociale du couple ne lui permettrait pas de l'élever dans de bonnes conditions, pour maîtriser la fertilité des couples ayant déjà plusieurs enfants et ne souhaitant plus en avoir d'autres... et bien évidemment pour se protéger mutuellement du virus du SIDA. De plus, pour ceux qui choisissent de ne pas tenir compte des principes d'abstinence et de fidélité, il est préférable qu'ils le fassent en se protégeant eux-mêmes et leurs partenaires (principe du moindre mal).

Et après ?
J'ose affirmer que si la méthode ABC était universellement appliquée, le SIDA disparaîtrait de lui-même en l'espace d'une génération. Je ne suis pas naïf et je sais aussi que ça ne sera jamais le cas. Alors, que faut-il de plus que cette méthode pour combattre la maladie la plus terrible que nous connaissons à notre époque ?
La première priorité est à donner à la médecine, qui fait un travail exceptionnel pour soulager la souffrance des malades et développer des traitements (trithérapie, etc.) de plus en plus efficaces pour en combattre les effets... en attendant l'heureux jour de la découverte d'un remède permettant enfin de guérir de SIDA !!! Alors, en cette Journée Mondiale de Lutte contre le SIDA, je souhaite rendre un profond hommage à tous ceux qui, dans le monde entier, viennent en aide aux personnes victimes de cette terrible maladie, et pour empêcher d'autres d'être eux aussi infectés. Je cite pèle-mêle, et liste bien évidemment pas du tout exhaustive : le Sidaction, AIDES, Aid for AIDS, Caritas, Samaritan's Purse, Christian Aid Mission, ONE (l'organisme de Bono, le chanteur de U2), etc.
Ensuite, un autre chantier important est celui de la prévention. Ici, je pense particulièrement au travail remarquable de AIDES, qui combat tous les facteurs d'infection. Notamment, grâce à leur travail de sensibilisation à l'usage unique de seringues, le taux d'infection chez les toxicomanes en France a été très considérablement réduit. Bien évidemment, il serait encore plus efficace de lutter contre la toxicomanie, mais nous savons tous qu'il est extrêmement difficile d'arrêter de se droguer et en attendant d'y être parvenu, il vaut mieux continuer en limitant au maximum les risques.
Enfin, c'est le rapport de la société aux personnes malades qui doit changer : les malades du SIDA souffrent, mais ils restent des êtres humains avec la même dignité que tous les autres. Pourtant, combien de fois ne sont-ils pas victimes de préjugés, rejetés, stigmatisés, exclus de la société ? C'est souvent le cas dans les sociétés traditionnelles du Tiers-Monde, surtout dans celles où l'épidémie est la plus forte Mais cela arrive aussi dans nos sociétés occidentales... et même surtout dans les cercles les plus "moraux-bien-comme-il-faut", pour lesquels le SIDA est la maladie des gays, des putes, des libertins et des drogués et qui, même s'ils ne le diront jamais ouvertement, ne sont pas loin de penser au fond d'eux que les malades l'ont de toute façon bien mérité... De loin toutes les personnes malades du SIDA n'ont pas été infectées à cause d'un comportement immoral et d'ailleurs même si c'est le cas, ça ne change absolument rien au fait qu'ils ont le droit tout autant que n'importe qui d'autre d'être aimés, respectés et secourus dans leur souffrance !!! Je conclus donc cet article en disant que personne ne mérite d'être rejeté ou discriminé parce qu'il est malade du SIDA et que tout doit être fait pour leur permettre de vivre une vie normale au sein de la société.

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